LES RENCONTRES DU PRIX JACQUES HUISMAN

Fondé pour soutenir la formation des jeunes artistes, le Prix Jacques Huisman a lancé des Rencontres – débats entre les étudiants de nos écoles supérieures d’art dramatique et les comédiens ou les metteurs en scène ayant acquis leur renommée en travaillant dans notre Communauté.

Le Prix Jacques Huisman incite aussi les jeunes comédiens et les étudiants à aller voir des spectacles exceptionnels en leur proposant soit des invitations soit des places à prix réduits.

A ces activités, les membres de notre association sont naturellement conviés.

Trajets parallèles

Le 19 novembre 2007 au Théâtre National, dans la salle Jacques Huisman, deux grands artistes, René Hainaux et Pierre Debauche ont évoqué leurs souvenirs. Titre de l'entretien : Trajets parallèles.

Alain Delava a tiré leur portrait !

René et Pierre  René

Pierre

et Françoise Nice a écrit cet article :

La soirée fut ouverte par Luc Van Grunderbeek, comédien, professeur à l’IAD et vice-président de l’association, qui n’eut qu’à passer le flambeau de la parole, tant René Hainaux et Pierre Debauche se sont montrés généreux et diserts pour le plus grand bonheur des spectateurs.

Pour participer à cette soirée de souvenirs croisés mais aussi de réflexion ancrées dans leur pratique passée ou actuelle du théâtre, il y avait là des amis de longue date, Suzy Falk ou Billy Fasbender, Robert Delville, bon nombre de comédiens anciens élèves ou partenaires de René Hainaux, comme Anne-Marie Loop, Christian Crahay, lui aussi professeur à l’IAD et venu ce soir-là avec ses étudiants.

Des étudiants qui ont montré leur très vif intérêt pour le Théâtre du Jour et le Théâtre-Ecole d’Aquitaine-Atrée fondés à Agen en 1994 par Pierre Debauche. Une école supérieure où les élèves sont plongés d’emblée et pendant trois ans dans tous les métiers du théâtre de l’écriture à la billetterie en passant par le jeu, la production, la régie.

En trois ans, cours théoriques le matin, répétitions l’après-midi et représentations le soir, chaque promotion de 15 étudiants se forme au théâtre et à la comédie musicale.

La recherche de pédagogies qui n’étouffent pas mais libèrent la créativité de chacun est la première préoccupation de René et Pierre.

Associé à la fondation de l’Insas en 1963, responsable de la section art dramatique au Conservatoire de Liège de1963 à sa retraite en 1983, René Hainaux a révolutionné l’enseignement du théâtre en Belgique, en introduisant de nouveaux cours, l’animation ou le jeu face à la caméra. Mais il a aussi ouvert les fenêtres des studios sur le monde, en invitant des praticiens étrangers à venir donner des stages à Liège pour quelques semaines ou quelques mois. Eugenio Barba, Christine Linklater et d’autres encore ont goûté les ardeurs mosanes.

Autre préoccupation partagée, le souci du public selon la formule étendard de Pierre Debauche à l’époque où il dirigeait leThéâtre des Amandiers à Nanterre : «l’avenir du théâtre est dans les mains de ceux qui n’y vont pas encore ».

Qu’il s’agisse de l’aventure des Comédiens routiers et de son débouché inattendu, la fondation du Théâtre National de Belgique en1945, fondation dont René Hainaux fut aussi l’un des protagonistes aux côtés des frères Huisman, ou qu’il s’agisse de jouer au chapeau dans les bourgs du Lot et Garonne, les deux compères ont un profond attachement pour le théâtre populaire et démocratique. Populaire, avec le souci de toucher tous les publics, enfants ou adultes, ruraux ou citadins, d’Europe et d’autres continents. Démocratique, en termes de coût et de diffusion.

Et c’est la troisième marque commune de ces deux amis, leur refus du pré carré et une curiosité qui les porte à priser l’air du grand large. Avec Monique Blin, Pierre Debauche a fondé le Festival des Francophonies de Limoges, une scène internationale et un carrefour des cultures qui ont notamment permis de révéler l’écrivain congolais Sony Labou Tansi dans les années 80.

De son côté, dès la fin de la guerre, à Prague en 47-48, René Hainaux participait à la naissance de l’IIT, l’Institut International du Théâtre, pour devenir ensuite pendant vingt ans le responsable de la revue World theatre et mener parallèlement ses recherches passionnées sur Le Décor de théâtre dans le monde.

Au feu de la parole partagée avec une discrète efficacité amicale par René les figures de Brecht, Piscator, Jean Vilar, Antoine Vitez, Henri Ronse, Georges Randax, Michel de Ghelderode ou Jacques Lecoq, mais aussi de Joseph Hanse, - une référence incontournable pour les deux romanistes Pierre et René -, Camille Gutt, Renée Lippens et bien sûr Jacques Huisman, se sont succédées. Figures de maîtres, de grandes personnalités, d’amis ou de hauts fonctionnaires ayant contribué au renouveau du théâtre, des festivals ou de la formation.

Soirée émaillée aussi de rires, avec quelques souvenirs de métier cocasses. Dans la belle humeur de René Hainaux et Pierre Debauche, le fil rouge de la transmission était ce soir-là plus que jamais alerte, chatoyant et stimulant.

« Si c’est pas un projet de bonheur, le théâtre, c’est pas la peine » a martelé Pierre Debauche avec le panache qu‘on lui connaît.

Françoise Nice

Journaliste à la RTBF et critique, licenciée en histoire et en études théâtrales, Françoise Nice a entrepris de recueillir les souvenirs croisés de René Hainaux et Pierre Debauche. Elle est à la recherche d’un éditeur.

francoise.nice@skynet.be

"Cymbeline" de Shakespeare

Le 28 mars 2007, c’est dans la nouvelle salle de Wolubilis que nous avons assisté à la remarquable mise en scène par Declan Donnellan, de Cymbeline de Shakespeare.

Une magnifique leçon de théâtre ; un spectacle d’une rare beauté ; des acteurs étonnants : on se rappellera longtemps de Tom Hiddleston, qui incarne les deux personnages principaux, se métamorphoser à vue dans le simple geste d’enfiler un imperméable.... et de Jodie McNee qui campe la délicieuse Imogene, absolument craquante !

Declan Donnellan, metteur en scène britannique, d’origine irlandaise a fondé à Londres en 1981 la Compagnie Cheek by Jowl. En plaçant toujours l’acteur au cœur de son travail, il explore d’un oeil nouveau les grands classiques du théâtre pour en révéler les richesses et les mystères. Il connaît depuis plusieurs années un succès international en tant que metteur en scène d’opéra et de théâtre. Ses spectacles tournent dans le monde entier et ont été plusieurs fois primés.

Declan Donnellan a reçu en 1990 le Prix Laurence Olivier pour l’ensemble de son oeuvre.

Il travaille depuis des années avec le scénographe Nick Ormerod qui a été également récompensé par le Prix Laurence Olivier en 1992.

Rencontre avec Adrian Brine

Le 28 novembre 2006, Adrian Brine s’est entretenu avec Philip Tirard de sa conception du théâtre, nourrie d’une vaste expérience internationale de Londres à Istanbul, en passant par Bruxelles, Paris, Amsterdam.

Adrian Brine, comédien et metteur en scène britannique, est devenu depuis 40 ans le compagnon de route de plusieurs théâtres belges : Théâtre de Poche, Le Rideau de Bruxelles et le Théâtre National.

La Rencontre a eu lieu dans la Salle Jacques Huisman du Théâtre National devant une centaine de personnes dont 50% d’étudiants du Conservatoire de Bruxelles et de l’IAD.

Adrian Brine a séduit le public par ses réflexions sur son métier, ses anecdotes pleines d’esprit, sa connivence avec les comédiens, ses souvenirs sur Claude Etienne et Jacques Huisman.

Voici quelques phrases prises au vol :

« Le théâtre ne connaît ni règles ni formules ni principes, mais remet tout en question. Il ne repose que sur des secrets ». (entendez « secret » au sens de « secret de fabrication).

« On constate aujourd’hui une difficulté d’accès aux pièces classiques, comme un malentendu. Les spectateurs ne reçoivent plus d ‘initiation à ces oeuvres dans le cadre de leur scolarité. Quand ils les voient au théâtre c’est le plus souvent dans des mises en scène référentielles et allusives qui leur échappent. Cela me rappelle un mot d’Arthur Miller qui déplorait que l’on mette en scène le concept de ses pièces au lieu des pièces elles-mêmes. »

« Le metteur en scène doit se mettre en même temps au service de l’œuvre et des publics auxquels elle s’adresse. Il n’y a plus désormais un public, mais des publics, de surcroît terriblement sollicités par le cinéma, la vidéo, l’internet. Il me semble qu’il s’agit aujourd’hui moins de diffusion que de discernement. Au Rideau de Bruxelles, j’éprouve toujours un grand bonheur : c’est un public curieux, attentif, respectueux, avec lequel on peut se permettre de prendre des risques, en leur présentant des œuvres contemporaines ».

« Pour moi le « théâtre populaire » aujourd’hui, c’est cela : des œuvres qui reflètent les questions qui se posent à tout un chacun, dans des esthétiques lisibles et accessibles. »

« Les comédiens belges sont ambitieux pour le spectacle auquel ils participent, plus que pour leur carrière. Quand je les compare à leurs collègues français et même anglais, ils témoignent d’une attitude plus modeste envers l’œuvre qu’ils ont à jouer. Le problème principal que connaît le théâtre en Belgique francophone, c’est le manque de moyens. Comparativement, les Pays-Bas consacrent beaucoup plus d’argent à cette discipline. Ils se sont aussi libérés du carcan des théâtres traditionnels, en reconvertissant d’anciennes usines en salles de spectacle. Plus neutres, plus vastes, plus ouverts, ces lieux contraignent moins le metteur en scène à mettre ses pas dans ceux de l’architecte : à l’exception des Halles de Schaerbeek, ce genre d’endroits manque à Bruxelles, me semble-t-il. »

"La Nuit des Rois" de Shakespeare

Le 29 novembre 2005, 150 amis ont assisté au Théâtre Royal de Namur à une représentation exceptionnelle de « La Nuit des Rois » de Shakespeare

jouée par des comédiens russes de Moscou dans la mise en scène de Declan Donnellan.

Declan Donnellan, maître de stage de notre lauréat Michelangelo Marchese, a séduit le public par l’intelligence du travail effectué sur le texte, l’énergie et le talent de la troupe de comédiens, la beauté de la langue russe qu’ils font entendre comme une musique (Le Monde)

Une vraie fête théâtrale...Une épatante soirée à l’issue de laquelle le public se leva comme un seul homme pour applaudir les artistes. Un vrai cadeau qui restera dans nos mémoires.

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